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Cher(e)s ami(e)s,

Quelques éléments de réflexion sur la réforme des retraites et sur la journée d’action du 5 décembre.

Quelle désolation que cette nouvelle situation de tension, de crises, de souffrances. Et de dégradation de l’image de la France sur la scène internationale.

Un pays moderne et leader ne peut pas perdre son temps, son énergie, son optimisme de cette façon. La France a besoin d’un retour au calme et à l’unité. Surtout à quelques jours des fêtes familiales de Noël.

La question de fond qui est posée est bien celle-ci : est-il possible de réformer ce qui doit l’être dans le calme et le consensus ? Après 3 ou 4 années, de secousses, de protestations, de violences, je maintiens que oui, c’est possible. Car on peut observer qu’à chaque blocage, à chaque levée de protestation, on a le même ressort de montée des tensions : l’orgueil mal placé et l’idéologie aveugle

L’orgueil c’est : on l’a dit, on le fait. Et comme on l’a dit, on ne recule pas. Sans même se poser la question du bien-fondé de ce qu’on a dit ! Le comble c’est quand un ministre déclare dimanche : la réforme on la fera ! ( droit dans ses bottes) et un autre ministre : on ne connaît pas encore la réforme, on vous en dira plus en janvier. C’est original comme nouvelle gouvernance : faire à tous prix une réforme inconnue...

L’idéologie : c’est cibler les régimes spéciaux en faisant croire que cela va régler le problème du déficit. Puis faire peur avec le déficit ( qui est l’épaisseur du trait comme dit Laurent Berger ) pour dresser les Français les uns contre les autres. Le chauffeur de car contre le chauffeur de bus. Repris en boucle par tous les membres du gouvernement comme symbole d’une insupportable inégalité. Mais les Français sont intelligents et ça ne prend pas. Ils n’ont pas oublié la suppression de l’ISF et la flat tax dont les rendements suffiraient sans doute pour régler la situation alarmante des hôpitaux.

Réduire 42 régimes différents ( dont 10 régimes spéciaux ) à un seul, est un vieux leitmotiv d’une certaine droite davantage mue par la critique du service public et des entreprises publiques. D’abord cette fusion brutale est impossible comme l’a dit Raymond Soubie peu suspect de militantisme gauchiste. Ensuite elle ne concerne que moins de 3 % des retraités et donc ce n’est pas cela qui va régler le problème financier. Et surtout plusieurs de ces systèmes sont les produits ne notre histoire et méritent le respect et une méthode de réforme tranquille au cas par cas. L’ignorance et le mépris consternants dont font preuve ces élus du nouveau monde qui déclarent « ne pas être fiers des régimes spéciaux » laissent sans voix. Heureusement que d’autres sont fiers d’avoir des parents ou grand-parents : mineurs, marins, cheminots ou agriculteurs...

Les enseignants et les femmes seront par exemple les grands perdants de ce système d’alignement vers le bas. Pour les premiers, la disparition du calcul sur les six derniers mois leur fera perdre beaucoup. En catastrophe, le ministre des finances a improvisé une annonce sur la hausse de leur salaire. Et bien faisons la avant pour rassurer ! Et on découvrira peut être que ce n’est pas gagnant pour les Finances publiques ...Mais entre temps on aura montré du doigt une profession mal rémunérée et essentielle à l’avenir de la Nation.

Les femmes : on sait, et la réforme Sarkozy de 2010 les a déjà pénalisées, que le système par points leur fera perdre entre 10 et 17 % de niveau de retraite ...

Dans ce contexte, où un autre grand service public, celui de la santé, attend des réformes justes qui le consolident et reconnaissent les métiers qui le font vivre, les Français ne comprennent plus quel est l’horizon et quel est le modèle national.
Retraite, Hopital , École : c’est le patrimoine de ceux qui n’en n’ont pas. Et les discours dédaigneux contre les services publics ne passent pas. Ils révoltent. Surtout dans un contexte de vie chère, où l’Etat a même renoncé à maîtriser les prix de l’énergie. Tout en étant en recul sur la transition énergétique avec la suppression du CITE.

D’expérience, on sait que pour faire baisser les tensions, ramener la paix civile, travailler à la concorde nationale, tout justifie que la réforme des retraites soit retirée ou suspendue ( comme on voudra puisqu’il faut gérer le recul... ) avant le 5 décembre.

D’expérience on sait que si par orgueil «on attend pour voir si ça passe ou ça casse », le coût des décisions à prendre sera bien plus élevé ( comme l’a prouvé le retard à retirer la taxe carbone) et le mouvement bien plus difficile à arrêter.

D’expérience on sait que ce n’est pas responsable d’attendre que le mouvement se disqualifie par les violences et les casseurs qui viennent s’y greffer. Car il y a un épuisement des policiers. Et des plaies à vie chez les manifestants. Que l’on n’avait jamais connues dans notre histoire sociale récente.

Retrouvons le modèle national et œuvrons à des réformes consensuelles qui sécurisent au lieu de faire peur de l’avenir. Et qui restaurent l’image de la France à l’international. Il en est encore temps.

Avec mes meilleures salutations,

Ségolène Royal